L’œil ne voit que ce que l’esprit est prêt à comprendre. Henri Bergson

Le biais de confirmation correspond à une tendance à vouloir confirmer nos hypothèses ou croyances.

Mécanismes

Afin de comprendre les mécanismes mis en oeuvres par le biais de confirmation, il faut définir quelques notions de psychologie sociale.

Une cognition correspond à un élément de connaissance (une idée, croyance, attitude, comportement, valeur ou émotion).

Notion de consistance :

  • 2 cognitions sont consonantes (ou consistantes) si elles sont harmonieuses ou cohérentes. Par exemple : “Jaime les fruits” et “les fruits sont bons pour la santé”
  • 2 cognitions sont dissonantes (ou inconsistantes) si elles sont en conflits, elles peuvent générer un état de tension ou de malaise. Par exemple : “j’aime le soleil” et “le soleil provoque des cancers de la peau”.

Les théories de la consistance cognitive postulent que les gens essaient de maintenir une certaine harmonie relativement à ce qu’ils pensent des autres et des choses, car un manque d’harmonie entraine un malaise. Suivant le principe homéostatique (de maintien d’un équilibre), tout déséquilibre ou incohérence déclenchera des mécanismes d’autorégulation visant à restaurer cet équilibre.

D’où le biais de confirmation, il permet de maintenir cette harmonie et d’éviter un malaise, un inconfort dans ce en quoi nous croyons.

Pour aller plus loin :

Théorie de l’équilibre cognitif (Heider)

Heider s’est inspriré du courant de la Gestalt (ou courant de la forme). Il transpose les lois de la perception des objets à la perception des individus.

Principaux postulats :

  1. Notre perception, ou conception des liens qui existent entre les personnes, entre les personnes et les objets, doit se constituer en “bonne forme” (manière équilibrée et consistante)
  2. L’existence simultanée d’éléments de connaissances qui ne s’accordent pas entraine de la part de l’individu un effort pour les faire mieux s’accorder.

Nous avons besoin de maintenir un certain équilibre dans notre univers cognitifs (c’est à dire dans nos pensées). Si cet équilibre est mis à mal, nous allons tenter de le restaurer à travers de deux façons. A travers l’action : Par exemple si je n’ai pas le même avis qu’un ami, je vais essayer de le convaincre afin que nous restions amis. Ou alors par une réorganisation cognitive : dans le même exemple, je me dis que mon ami n’est pas aussi agréable que je le pensais et que finalement ce n’est peut être pas vraiment mon ami. L’équilibre est ainsi restauré.

Des recherches dans le domaine des opinions politiques ont montré que :

  • les électeurs perçoivent leur candidat favori comme promoteur des positions qu’ils privilégient eux-mêmes
  • Les gens ont tendance à augmenter la similitude d’opinion entre eux et autrui s’il leur apparait comme attrayant.

Théorie de la dissonance cognitive (Festinger)

Les postulats sont les mêmes que pour la théorie de l’équilibre cognitif.

Une relation de dissonance entre deux pensées (cognitions), c’est à dire une contradiction, une incohérence amène l’individu à ressentir un état d’inconfort psychologique. On parle d’éveil de la dissonance : La perception de l’incohérence entre deux éléments entraine un état de dissonance, c’est à dire d’inconfort psychologique qui va motiver le sujet à le réduire.

Les chercheurs ont même pu mettre au point un outil de mesure de la force de dissonance : Le taux de dissonance = Nombre et importance des éléments dissonants/Nombre et importance des éléments dissonants + consonants.

On voit alors aisément que diminuer les dissonance ou leur importance et augmenter les éléments consonants permet à l’individu de diminuer cette indice et donc de diminuer cette inconfort psychologique.

Modes de réduction de la dissonance :

Ces modes de réduction peuvent donc être utilisés dans le phénomène du bais d’auto-confirmation.

La rationalisation cognitive : Elle consiste en une réduction de la dissonance cognitive par changement d’attitude post-comportemental. L’individu va modifier son attitude initiale pour la rendre plus conforme au comportement problématique réalisé.

Elle peut prendre différentes formes :

  • Le déni : L’individu va nier la véracité des nouvelles cognitions qui entrent en contradiction avec ses croyances initiales
  • L’étayage : L’individu va ajouter de nouvelles cognitions consonantes pour rétablir le rapport entre les cognitions consonantes et inconsistantes. C’est à dire qu’il va trouver des raisons, justifications en plus en faveur de son comportement.
  • Le changement radical : de la cognition initiale. Par exemple pour un sujet qui fumait, il intègre le fait que “fumer donne le cancer” à son système cognitif et arrête de fumer.

La trivialisation : L’individu va dévaloriser l’importance des cognitions qui entraient en contradiction avec son attitude de départ. Par exemple pour un fumeur, il va pouvoir penser :” Il faut bien mourir de quelque chose”.

La rationalisation comportementale : La dissonance sera réduite lorsque l’individu, suite à un premier comportement problématique, il a la possibilité d’en réaliser un autre.

Expérience de Rosenhan

Mise en évidence du biais par l’expérience de Rosenhan : Elle montre l’importance des biais de confirmation dans la formulation d’hypothèses et donc l’établissement du diagnostic psychiatrique.

L’expérience se déroule en deux volets :

1er volet : Des compères en bonne santé mentale se présentaient dans 12 hôpitaux psychiatriques aux États-Unis, feignant des hallucinations auditives. Ils furent tous admis ce qui, jusqu’alors n’a rien d’étonnant. En revanche, après leur admission, ils agissaient normalement, et déclaraient au personnel soignant qu’ils n’avaient plus d’hallucination du tout. Le personnel des différents hôpitaux a mis beaucoup de temps à réaliser la supercherie et restait persuadé que ces pseudo-patients avaient réellement les symptômes de la schizophrénie. Les patients sont ainsi restés internés de 7 à 52 jours avec une moyenne de 19 jours avant de pouvoir sortir.

2ème volet : Rosenhan va réaliser 6 mois après ce que l’on appelle une contre expérience afin de vérifier les résultats de la première. Il annonce donc qu’il va tenter de réintroduire de nouveaux pseudo-patients dans les hôpitaux. On demande donc au personnel d’un hôpital psychiatrique d’identifier de faux patients dans un groupe qui n’en comportait pas. Le personnel soignant va faussement détecter comme “imposteurs” un grand nombre de vrais malades !

Cette recherche met en évidence que le fait d’avoir une croyance et donc certaines attentes vis-à-vis d’un patient, a pour conséquence de nous pousser à sélectionner l’information congruente avec le diagnostic posé et à vouloir le vérifier à tout prix dans la réalité. 

Effet Pygmalion

Le biais de confirmation peut faire référence à l’effet pygmalion (aussi appelé effet Rosenthal) mis en évidence par Rosenthal et Jacobon.

L’ Effet pygmalion correspond à la mise en conformité des compétences d’une personne avec les attentes à son égard. Il correspond à une “prophétie auto-réalisatrice”.

L’effet pygmalion à l’école :

Rosenthal a réalisé des travaux afin de prouver l’effet pygmalion à l’école et de déterminer si les attentes des instituteurs concernant les élèves avaient une influence sur leur réussite.

On peut aujourd’hui remettre en question l’éthique de l’étude, on se verrait mal aujourd’hui traiter des enfants différemment afin d’étudier leurs réactions …

Pour son étude, Rosenthal a fait croire aux enseignants que certains de leurs élèves étaient surdoués, afin de savoir si cela allait affecter leurs performances scolaires.

L’expérience a eu lieu dans une école ou de nombreux élèves étaient en échec scolaire.

En septembre, les chercheurs ont fait passer des tests de Q.I. à tous les enfants. Mais ils ont gardé les résultats pour eux, et ont fait croire aux professeurs qu’il s’agissait d’un « tout nouveau test mis au point à Harvard, et destiné à détecter les élèves susceptibles de progresser de manière spectaculaire pendant l’année à venir ».

Les chercheurs ont ensuite sélectionné au hasard cinq enfants par classe, et ont fait croire aux professeurs que ces enfant avaient eu d’excellents résultats au test, et qu’on pouvait s’attendre à ce qu’ils fassent des progrès très importants au cours de l’année.

A la fin de l’année scolaire, les chercheurs ont refait passer un test de QI à tous les élèves pour comparer les résultats des élèves dits normaux et ceux des élèves désignés comme prometteurs.

Les résultats du tableau sont donnés pour chacune des 6 classes (les sigles sont en anglais : Grade 1 pour CP, Grade 2 pour CE1, etc.). On compare l’écart entre le groupe désigné (les pseudos élèves prometteurs en rouge) et le groupe contrôle (les élèves dits normaux en gris) :

Comme on peut le voir sur le graphique, les élèves désignés comme « prometteurs » ont en moyenne beaucoup plus progressé que les autres. Ces résultats sont particulièrement vrais pour les classes de CP et de CE1 pour lesquelles on peut penser que les attentes des enseignants jouent un grand rôle.

Ces élèves « prometteurs » ont également été perçus comme plus performants et plus agréables que les autres par leurs professeurs, alors qu’ils avaient en réalité été choisis au hasard…

Ainsi, les élèves agissaient de façon conforme à ce que les professeurs attendaient d’eux, ils réalisent cette prophétie auto-réalisante.

Source : https://psy-enfant.fr/effet-pygmalion-ecole/