Avant toute chose, je vous demanderais de répondre à un quiz. Rien de bien compliqué : il s’agit tout simplement d’un test de personnalité.
Je vous demanderais de ne pas tricher et de commencer par le test de personnalité avant de lire la suite de l’article.
C’est parti !
Le test est fait ? Vous avez pu lire quelle était votre personnalité ? Parfait. Maintenant, je vais vous demander une dernière petit chose : répondez à l’unique question ci-dessous.
Explication
Vous vous reconnaissez ? Pourtant, ce résultat à un sens pour tout le monde, de ce fait, pour personne. Nous sommes face à un biais cognitif très puissant : l’effet Barnum. C’est un biais cognitif, ainsi qu’une technique de manipulation, qui conduit un individu à considérer une description générale et floue de traits de personnalité comme s’appliquant précisément à sa propre personnalité. Cela repose sur le phénomène de validation subjective.
Synonymes : effet Forer, effet puits, effet de validation subjective, effet de validation personnelle.

L’effet Barnum est une expression attribuée au psychologue Paul Meehl (1920-2003) en référence aux talents de manipulateur de l’homme de cirque Phineas Taylor Barnum (1810-1891), qui dans les années 1850 avait mis au point un numéro dit de “lecture à froid”, – une technique très utilisée par les médiums et autres astrologues – où l’on racontait des généralités sur les personnes, mais qui paraissaient ne s’appliquer qu’à un seul spectateur cible. Celle-ci consiste à analyser le comportement, les expressions faciles et le langage corporel de son interlocuteur afin de lui “prédire” des informations pouvant coller à son histoire personnelle.
L’effet Barnum peut être utilisé dans plusieurs domaines tels que : l’astrologie, la numérologie, la cartomancie, la chiromancie, la graphologie, dans les horoscopes, la voyance, dans les pseudosciences en général, dans les tests de personnalité, la politique, la séduction, etc…

Ce biais a été démontrer à travers l’expérience de Forer de 1948. Pour dénoncer la banalité et la généralité des descriptions de personnalité dressées par les astrologues, Bertram R. Forer a eu l’idée de faire l’expérience de ce qui deviendra l’effet Barnum. Il fit passer à chacun de ses étudiants un test de personnalité. Il jeta ensuite ces résultats à la poubelle et recopia un texte d’une analyse de personnalité extraite de la rubrique astrologique d’un magazine quelconque :
“Vous avez besoin d’être aimé et admiré, et pourtant vous êtes critique avec vous-même. Vous avez certes des points faibles dans votre personnalité, mais vous savez généralement les compenser. Vous avez un potentiel considérable que vous n’avez pas tourné à votre avantage. A l’extérieur vous êtes discipliné et vous savez vous contrôler, mais à l’intérieur vous tendez à être préoccupé et pas très sûr de vous-même. Parfois vous vous demandez sérieusement si vous avez pris la bonne décision ou fait ce qu’il fallait. Vous préférez une certaine dose de changement et de variété, et devenez insatisfait si on vous entoure de restrictions et de limitations. Vous vous flattez d’être un esprit indépendant et vous n’acceptez l’opinion d’autrui que dûment démontrée. Vous pensez qu’il est maladroit de se révéler trop facilement aux autres. Par moment vous êtes très extraverti, bavard et sociable, tandis qu’à d’autres moments vous êtes introverti, circonspect, et réservé. Certaines de vos aspirations tendent à être assez irréalistes.”
Une semaine après l’avoir administré à 39 élèves d’une classe, il leur a proposé une courte analyse de leur personnalité et leur a demandé d’en évaluer l’exactitude sur une échelle de 0 (nulle) à 5 (totale). Bien sûr, le portrait était le même pour tous ! Pourtant chacun s’y est reconnu fortement : on retrouve une moyenne de 4,2 au total sur les 39 élèves. Ce qui est fascinant, c’est que jamais en pareil cas il ne vient à l’esprit des sujets, ne serait-ce qu’une seconde – sauf si on le leur demande de façon expresse –, que la description pourrait tout aussi bien convenir à leurs voisins. L’impression immédiate de s’y reconnaître de façon singulière est extrêmement puissante.
D’autres études (D.H. Dickson et L.W. Kelly) ont montré que cet effet était augmenté notamment si :
- la persuasion du sujet que l’analyse s’appliquait à lui seul ;
- la reconnaissance par le sujet d’une autorité de l’évaluateur ;
- la présence dans l’analyse de traits majoritairement positifs.

Le fait d’avoir découvert et mit en lumière ce biais permet de prévenir contre ce phénomène et est un moyen de défense contre les pseudosciences, utilisés par la zététique – créé par Henri Broch, aussi appelé “l’art du doute”-. Les pseudosciences sont définies par un raisonnement qui prend l’apparence de la science sans en respecter le principe (aucune rigueur scientifique). Elles s’opposent à la science. Pour en savoir plus là-dessus, une page dédié sur ce phénomène est disponible sur le site.
“Quelque bien qu’on dise de nous, on ne nous apprend rien de nouveau”. Maxime de la Rochefoucauld.